De l’autre côté de l’eau, Elizabeth Acevedo

Genre : Contemporain/Poésie/Jeunesse 🇺🇸

464 pages

Note : 3 sur 4.

« Camino vit en République dominicaine, Yahaira à New York. Elles n’ont jamais entendu parler l’une de l’autre.

Quand un avion reliant New York à la République dominicaine s’abîme en mer, leurs mondes entrent en collision. Mais en endeuillant leurs familles, le crash expose au grand jour un terrible secret.

Alors que leurs vies volent en éclats, Camino et Yahaira découvrent l’existence l’une de l’autre. Et si elles avaient bien plus que ce drame en commun ? »

Chronique du soir, bonsoir. Il me faut remarquer une certaine tendance à composer mes avis à des heures endormies en ce moment, là où j’apprécie ordinairement m’occuper de cela le matin. Me voici en tout cas de retour aujourd’hui avec une chronique particulière, puisque portant sur ma toute première lecture d’une œuvre en vers libres. Késako ? D’après notre ami internet : « Un poème en vers libres est un poème qui ne présente aucune structure définie. Les vers sont de longueur variable et peuvent être rimés ou non. Le poème en vers libres n’est pas nécessairement constitué de strophes et ne respecte pas un rythme fixe, c’est-à-dire que le nombre de pieds par vers est variable. » Vous pouvez, grâce à l’extrait publié ci-dessus, vous rendre plus clairement compte de ce que cela peut donner.

Pour ma part, le pas a été sauté grâce aux vidéos du Souffle des mots, unique Booktubeuse (n’hésitez pas à m’en conseiller en commentaire) que je suis et qui vante assidûment ce genre qui, de prime abord, ne m’attirait pas.

L’histoire est celle de deux jeunes femmes : Yahaira la New-Yorkaise et Camino la Dominicaine. Âgée toutes les deux d’à peine dix-sept ans, elles ignorent l’existence de l’une et l’autre, mais ont pourtant bien un point commun, et pas des moindres : leur père, un homme qui va tragiquement perdre la vie dans le crash d’un avion. Chacune à leur manière, elles vont tenter de faire leur deuil, mais vont également peu à peu découvrir que ce père qu’elles aimaient tant cachait bien des secrets. Comment cet homme a-t-il pu jongler toutes ces années entre ces deux familles à l’univers totalement différents ?

« Je crois que je déteste cette sœur.
Elle m’envoie un message, elle me dit qu’elle a acheté un billet d’avion.
& elle dit ça comme si c’était rien du tout.

Parce qu’elle n’a eu besoin d’aucune paperasse, parce que personne ne s’est demandé si elle resterait ici après l’expiration de son visa.

Toutes ces années où mon père a tenté
de me faire venir aux USA, 
& cette fille, là-bas, remplit un petit formulaire, on lui donne l’autorisation, un passeport bleu – putain, elle est la bienvenue sur la planète entière. »

Chaque chapitre/poème va ainsi suivre le point de vue de l’une ou l’autre, Camino ou Yahaira. D’un côté, la pauvreté et l’imprévisibilité de chaque journée, dans un pays a priori enchanteur – la République Dominicaine – mais qui dépend terriblement de l’argent du tourisme. De l’autre, les tourments plus « classiques » d’une jeune Américaine qui vit dans un pays plus riche économiquement, ce qui n’amoindrit pas la peine d’avoir perdu son père. Et en point commun, un afflux de questions autour de la filiation et de l’avenir.

Nous sommes donc, avec De l’autre côté de l’eau, dans un roman (puis-je l’appeler ainsi ?) qui aborde bon nombre de sujets considérables. Et en cela, le choix d’écrire en vers libres apporte abondamment. Premièrement, cela injecte une attitude revendicative au texte, comme si les pensées et les idéaux des deux filles étaient scandés en un souffle. On y distingue réellement une ardeur des mots qui nous emporte bien plus plaisamment que ce à quoi je m’attendais. Et deuxièmement, cela laisse le temps de cogiter : l’esprit peut divaguer à l’issue d’un poème ou même d’un paragraphe sans avoir peur de perdre le fil, ce qui m’arrive parfois avec un roman classique plus ramassé. Finalement, on pourrait presque dire que ce type d’écriture se montre plus facile d’accès qu’une écriture « normale » !

Il me faut néanmoins relever quelques intentions manquantes. Tout d’abord, et cela revient fréquemment dans d’autres critiques, nous ne distinguons pas clairement les deux personnages. Dans le sens où rien n’est fait par Elizabeth Acevedo – ou trop peu – pour que l’écriture diffère et appuie les traits de caractères de l’une et l’autre. C’est dommage. Et ensuite, les deux premiers tiers sont un brin longs en regard de la dernière partie – qui comporte les évènements que nous attendons durant toute la lecture. Il aurait fallu davantage, car nous touchons enfin du doigt – à mon sens – au cœur du problème, à savoir cette sensation de ne pas être née dans le bon pays et le sentiment d’injustice qui peut en résulter. L’autrice passe vite là-dessus, alors que ce sont les paragraphes les plus forts, mais aussi les plus révoltés.

De l’autre côté de l’eau reste tout de même un texte hyper intéressant à découvrir, qui vaut largement le coup si vous souhaitez explorer le genre ou bien découvrir l’autrice. On ne peut que se réjouir de voir que de telles œuvres paraissent ces dernières années en littérature jeunesse, c’est véritablement rafraichissant – aussi bien dans la forme que dans les sujets.

En conclusion… Belle découverte, qui permet de se rendre compte de l’accessibilité instinctive de l’écriture en vers libres.

↪ Un avis mitigé chez Autumn & Latte, qui connaît bien l’œuvre de l’autrice.


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4 réponses à « De l’autre côté de l’eau, Elizabeth Acevedo »

  1. Avatar de ducotedechezcyan
    ducotedechezcyan

    ça a l’air très touchant et très original dans le format. Je le note, merci 😉

    Aimé par 1 personne

    1. Je t’en prie !
      C’est en effet – ce titre ou un autre – une « expérience » de lecture à tenter au moins une fois.

      Aimé par 1 personne

  2. J’ai eu un coup de cœur pour le livre « Signé Poète X » de la même autrice.
    Ravie de voir que ses autres romans sont également écrits en vers libres 🙂

    Aimé par 1 personne

    1. J’en ai en effet lu beaucoup de bien et pense le lire dans les mois à venir. Il semble particulièrement percutant.

      Aimé par 1 personne

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