Par le fer et le feu, R. Oncedor

Genre : Fantasy 🇫🇷

378 pages

Note : 3 sur 4.

[Livre obtenu via la plateforme Simplement.pro, un grand merci à l’autrice.]

« Un homme. Une démone. Lequel triomphera de l’autre ?

Au cœur d’un Moyen-Age tourmenté par les succubes et autres esprits malins, Alban a juré de ne jamais devenir une proie. Misogyne et solitaire, c’est un tueur de monstres, un homme défiguré par son passé. Un homme qu’une démone maladroite va tenter de corrompre … pour le meilleur et pour le pire. Entre mensonges et faux-semblants, lequel tuera l’autre dans ce jeu meurtrier ? »

Le récit commence très fort, avec l’histoire tragique d’un garçonnet qui voit son enfance disparaître brutalement, dans un Moyen-Âge où les superstitions sont reines – particulièrement lorsqu’il s’agit d’y condamner les femmes. Lui, c’est Alban. Il perd lors d’une terrible nuit son père, possédé par un démon dans ses songes. Dès lors, l’horrible rituel s’applique : chaque bête de ferme de sexe féminin est abattue, les filles de la famille mises à l’écart ; quant à sa mère, elle se crève les yeux elle-même avant de disparaître, sous le regard intraitable des Anciens pour qui il s’agit de la seule et unique solution afin d’éloigner le Mal.

Devenu adulte, Alban a gardé chevillée au corps la détestation du sexe féminin. Il vit en marginal – c’est ironique : dans un grenier qu’il loue à un bordel ! – et gagne de quoi survivre grâce à la vente quotidienne du petit gibier qu’il chasse. Une vie triste et morne, qui va être chamboulée par l’apparition d’une bête pas comme les autres qu’il va trouver au marché de la ville : une licorne, réputée éloigner les démons.

Cette licorne n’en est à vrai dire pas réellement une. Il s’agit de la forme qu’on a choisi pour Iluth, un succube. En effet, depuis le Ciel, les Démons veillent sur la vie des hommes – qu’ils méprisent pour leur faiblesse. Et Iluth a été mise au défi par ses sœurs démones de corrompre l’âme d’Alban en parvenant à le séduire, ce qui semble pratiquement irréalisable tant son histoire personnelle l’a rendu imperméable à la tentation. Et débuter dans l’enveloppe corporelle d’une bête ne va pas faciliter les choses.

« – Quoi que tu fasses, quoi que tu m’infliges, je te suivrai aussi loin qu’il le faudra ! Tu auras beau décapiter mes frères et mes sœurs, tuer autant de dragons que tu voudras, me traîner dans la boue et me blesser sans le penser, te moquer de moi et ignorer mes douleurs, jamais tu ne me laisseras derrière toi. Je serais toujours là, comme ton ombre, dans tes rêves et derrière le moindre de tes pas. Je serais là et jamais tu ne me blesseras assez pour me faire fuir. »

Voilà un roman qui ose aller jusqu’au bout de ses idées ! À mi-chemin entre une fantasy médiévale sombre pour le cadre, piochant de ci-dans la romance, de-là dans le théâtre (voire la tragédie) lors de courts chapitres impliquant uniquement les Succubes, Par le fer et le feu a comme mérite sa grande originalité.

Il y a tout d’abord les personnages ; vous vous en doutez, vus leurs parcours/origines, ce ne sont pas des enfants de chœurs. Alban déteste réellement la gent féminine, il est vulgaire, borné, cruel et bigot. Iluth est capricieuse, égoïste et tout aussi impitoyable. On voudrait les aimer, on leur cherche des qualités, des moments de bonté, mais l’autrice sait nous rappeler à l’ordre avec une violence et un ton sombre que j’ai personnellement beaucoup appréciée, dans le sens où cette lecture est très « adulte » – et les personnages pas là pour qu’on s’y identifie. Elle ne nous brosse jamais dans le sens du poil, à l’image d’une fin osée (mais comment aurait-il pu en être autrement ?). Leurs interactions sont étonnantes : conflictuelles au quotidien, plus symboliques et libres dans le monde des songes où chacun va peu à peu tomber le masque, pour le meilleur et pour le pire.

L’histoire en elle-même repose donc beaucoup sur la relation de nos deux protagonistes. L’autrice n’oublie tout de même pas de nous présenter un contexte soigné ; si elle fait vivre le Moyen-Âge, elle ne mentionne en revanche aucune ville ou aucune date précise. Son style est hyper soigné, j’ai beaucoup apprécié le fait qu’elle sache trouver pour chaque héros un langage propre, mais ai surtout été épatée par les courts chapitres façon théâtre que j’évoquais au-dessus. Au départ, en lisant le premier, j’ai eu franchement peur ; mais mon appréhension s’est vite envolée. L’idée de théâtraliser les réactions des Succubes contribue à faire ressortir leur dangerosité et non pas leur « supériorité » mais leur appréhension du monde différente de celle des mortels, d’autant que ces phases dialoguées sont très bien écrites.

Finalement, ce qui m’a manqué dans ce roman, c’est peut-être un rythme davantage soutenu. Non pas que le rythme soit en dent-de-scie, pas du tout, mais disons que l’issue de la première moitié traîne à mon sens un peu trop en longueur (en gros, pour celles et ceux qui l’ont lu, jusqu’à ce qu’ils trouvent l’enfant) sur sa fin. L’autrice évoque à la fin son envie de départ de faire de cette histoire une nouvelle ou un court texte : non 😆. Clairement, l’histoire d’Iluth et d’Alban mérite ce développement au long cours, trop précieux pour comprendre réellement les tenants et les aboutissants de ce qu’ils sont/ne sont pas l’un pour l’autre.

Enfin, un mot tout de même sur la mise en page. Au départ, j’ai un peu râlé en constatant qu’il s’agissait d’un PDF (le rendu n’est pas toujours génial sur liseuse) mais R. Oncedor a effectué un très joli travail sur la présentation de son texte, sa pagination, sa structure. Un grand bravo pour cela, c’est une pure réussite !

En conclusion … Un très bon roman au ton adulte, qui fait la part belle à des protagonistes bien écrits.


8 réflexions sur “Par le fer et le feu, R. Oncedor

  1. Light And Smell dit :

    Ayant adoré un autre roman de l’autrice, j’avais failli craquer pour la version deluxe de celui-ci, mais j’ai eu peur que ce soit un peu trop sombre par rapport à ce que j’aime. Mais en te lisant; je me dis que je pourrais clairement aimer, d’autant que tu m’intrigues avec la fin et la théâtralisation de certaines réactions.

    Aimé par 1 personne

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