La princesse au visage de nuit, David Bry

Genre : Fantastique 🇫🇷

280 pages

Note : 2 sur 4.

[Lu dans le cadre du Prix Imaginales des Bibliothécaires 2021.]

« Dans les bois vit la princesse au visage de nuit ; ses yeux sont des étoiles et ses cheveux l’obscur.

Hugo, enfant violenté par ses parents, s’est enfui avec ses amis dans la forêt, à la recherche de la princesse au visage de nuit, qui exaucerait les vœux des enfants malheureux… Il est ressorti du bois seul et sans souvenirs et a été placé dans une famille d’accueil.

Vingt ans plus tard, alors qu’il a tout fait pour oublier son enfance, Hugo apprend la mort de ses parents. Mais, de retour dans le village de son enfance, il découvre que ses parents auraient été assassinés, et d’étranges événements se produisent. La petite voiture de son enfance réapparaît comme par magie. De mystérieuses lueurs brillent dans les bois. Les orages soufflent des prénoms dans le vent. »

Ce court roman que j’ai personnellement lu quasi d’une traite réunit en tout cas tous les atouts nécessaires dans la course à la distinction – même si de fait, je lui trouve quand même quelques défauts m’empêchant d’en faire une excellente lecture.

De nos jours, Hugo – presque trentenaire – est un jeune Parisien qui trimballe son mal de vivre entre son boulot (il est éducateur) et ses potes qu’il retrouve quasiment tous les soirs dans leur quartier général, un bar branché où ils enchaînent les verres d’alcool. C’est un appel téléphonique qui le sort de son quotidien bien huilé : Anne, la petite sœur d’une amie disparue désormais devenue gendarme lui annonce que ses parents sont morts dans un accident de voiture suspect. Hugo retourne donc là où il a grandi jusqu’à ses 11 ou 12 ans – avant d’être placé en foyer pour le sauver de parents maltraitants : un petit village de campagne, isolé de tout, où tout le monde se connaît et où le temps semble s’être suspendu.

« Hugo reste là, immobile, le temps de reprendre son souffle. Il jette un regard alentour. Personne. Il allume la lampe de son téléphone, s’approche des fourrés.

La terre est humide. La chose qui l’observait, tapie dans le noir, a forcément laissé des traces. Mais il n’y en a aucune au sol.

Juste quelques lucioles qui volettent.

Encore. »

Quid de cette Princesse au visage de Nuit ? Cela reste assez mystérieux au départ, je ne vais donc pas en dire trop. Sachez simplement qu’il s’agit d’un très vieux mythe du village, à savoir celui du spectre d’une noble maudite dont on dit qu’elle aurait le pouvoir d’exaucer les vœux. Une fable à laquelle les adultes ne semblent plus croire que les jeunes générations ne connaissent pas.

Saint-Cyr (le nom de la bourgade) est la très grosse réussite de ce roman. Ayant grandi dans un village où ma famille était très ancrée (grands-parents paternels et père né sur place inclus (et pas à l’hôpital, parce qu’il n’y en a pas)), au sein d’une famille domiciliée, elle aussi, en campagne (notamment mes grands-parents maternels, qui nommaient leurs voisins « la mère unetelle » ou « le père untel » et appelait la campagne alentour « le pays »), il m’a fallu très très peu de temps pour me sentir familière de l’environnement. Le poêle sur lequel réchauffe le café ♥️, la pizzeria-troquet, les gendarmes, la magnétiseuse, la connivence parfois réconfortante parfois écrasante, les rumeurs, les non-dits, l’attachement aux vieux-titres de noblesse, … Ce que j’ai surtout apprécié, c’est le regard à la fois tendre et cruel de l’auteur – à travers son personnage – là-dessus. Pas de jugement, juste un état de fait sans idéalisation ni ironie.

Du côté des personnages, Hugo – dont on suit tout du long le point de vue – est un jeune homme intéressant dans ses fêlures. Sa relation amour/haine avec ce cadre qui l’a vu grandir et connaître ses plus grands drames, sa vie Parisienne bruyante … Je l’ai trouvé vraiment bien écrit, même si le récit ne capture qu’un instantané de sa vie et ne permet pas forcément de bien le comprendre dans son entièreté. En revanche, j’ai eu beaucoup de mal avec sa bande de copains, dont j’ai trouvé l’omniprésence superficielle – dans le sens où finalement, ils n’apportent pas grand-chose à l’histoire sauf des problématiques à la fois trop importantes et trop peu développées. Ils ont en quelque sorte trop de mal à exister hors du « cliché » auquel ils sont rattachés, ce qui est aussi le cas pour certains habitants du village de Saint-Cyr. Peut-être que c’est là finalement que la brièveté du récit a pêché concernant mes attentes et mes goûts en tant que lectrice, parce qu’à mon sens, il manque dans cette galerie de personnages de la subtilité et du fond, ce qui est un peu rédhibitoire pour moi.

Dommage, car Saint-Cyr est un cadre idéal pour un récit fantastique. Il y a de vieilles bâtisses certes, mais c’est surtout la proximité de la nature qui va être déterminante, avec ces bois et ces sous-bois qui jonchent le paysage. Une manière habile d’entretenir le mystère qui va permettre au fantastique de se faire ténu tout du long. En effet, qui n’a jamais eu l’impression d’entendre un bruit étrange/inexplicable en forêt ? Enfant et adulte sont à égalité là-dessus et c’est finalement autour de cela que le mystère va s’articuler, donnant lieu à un final assez poétique à défaut d’être inattendu.

En conclusion … Une lecture intéressante malgré les défauts pointés plus haut. Je tiens à saluer la volonté de l’auteur d’écrire un roman « de genre » se déroulant en France, un peu comme ce qu’avait proposé Rozenn Illiano avec Le phare au corbeau.

💼 Et l’avis des collègues ? Il y a eu un coup de cœur (inattendu !) sur ce titre de la part d’un collègue que je connais bien et qui tout comme moi a été sensible à la manière dont est dépeint le village. Pour le reste, tout le monde a relativement apprécié, bien que certains pensent que le fantastique arrive trop tard dans le récit. C’est un roman qui finira potentiellement à la troisième/quatrième place du top 5 de presque tout le monde.




7 réponses à « La princesse au visage de nuit, David Bry »

  1. […] Une déception : Oui ! Immoral Stepbrother de Lila Collins ne m’a pas autant plu que ce à quoi je m’attendais. Cela a également été le cas de La princesse au visage de nuit de David Bry. […]

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  2. […] La princesse au visage de nuit, David Bry >>MA CHRONIQUE<< : Tout à fait le genre de roman que j’aurais voulu apprécier davantage ! Il avait tout pour […]

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  3. Je suis ravie que tu aies aimé l’ambiance de ce village qui, comme tu le dis, est le cadre idéal pour un récit fantastique. Comme toi, je n’ai pas été intéressée par les passages avec les potes. Cela alourdissait le récit et ne servait pas à grand-chose. Enfin, je te rejoins sur le fait que cela reste une bonne lecture avec une atmosphère particulière. ❤

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    1. Oui, l’atmosphère est originale ! Du coup j’ai bien envie de lire autre chose de l’auteur désormais.

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  4. Ravie de le voir aussi bien placé, j’avais aussi beaucoup aimé l’univers et l’ambiance de ce roman l’an passé ^-^

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    1. Oui l’ambiance est très réussie !

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