Genre : Biographie
298 pages
Lu dans le cadre du PRIX des lectrices ELLE 2020
« À la suite du succès de son livre Délivrées ! Titiou Lecoq ne va pas bien. L’époque lui dicte de réussir, elle réussit. Mais pourquoi est-ce que cela ne la rend pas heureuse ? Elle ne sait pas quoi faire. Un jour, pour tromper la déprime, elle décide de visiter la maison d’Honoré de Balzac. Une rencontre s’opère. Une révélation également. Balzac, que Victor Hugo désignait comme « le travailleur puissant et jamais fatigué », n’est pas seulement ça. Il existe un Balzac intime, humain, fatigué, qu’on pourrait nommer le plus grand poissard de l’histoire littéraire. Balzac est un looser magnifique. Et pour une société comme la nôtre, obsédée par l’idée de réussite, c’est un flamboyant contre-exemple. »
Les + : Drôle, complet.
Les – : RAS.
Ma lecture d’Honoré & moi a été l’occasion de faire un constat : cela faisait longtemps que je n’avais pas ri devant un livre. En fait, il m’est même assez rare de rire en lisant. Pourtant, ça a quelque chose de très agréable. Très honnêtement, je ne pensais pas que ma lecture la plus poilante de 2020 serait du genre biographique.
« L’un de nos plus grands écrivains a eu une vie d’emmerdements assez classiques, la vie d’un homme avec ses soucis d’argent, ses rêves de devenir propriétaire, ses problèmes de travaux, son goût des fringues, ses pulsions d’achat, ses humiliations, ses espoirs que l’avenir serait meilleur, ses insomnies, ses migraines, ses brûlures d’estomac, sa mort.
Pourtant, il était bien un peu génial, Honoré ? Evidemment. Mais son génie ne reposait pas sur un pouvoir magique ou une essence supérieure. Il y a des êtres qui ont plus manifestement la capacité à penser, librement, et c’est cette liberté, hors des cadres préconçus qui laisse leur chance aux possibilités, en ouvre les champs. C’est cela, ajouté à la certitude de son propre talent, à la capacité à s’autolégitimer, et l’aide de certaines circonstances, qui amène Honoré Balssa, petit-fils de paysans du Tarn, à concevoir La comédie humaine. »
Inutile de faire un résumé de six pieds de long pour le dire : ce livre est une biographie somme toute assez traditionnelle – car plutôt chronologique – d’Honoré de Balzac, un genre de monstre sacré de la littérature française. Le genre que j’ai parfois aimé (La peau de chagrin par exemple) et qui m’a parfois fait m’arracher les cheveux (lecture mémorable du Colonel Chabert au collège). Mais surtout le genre qui me fait me dire qu’en faite, je n’ai quasiment rien lu de lui.
Tout au long des pages, Titiou Lecoq s’évertue à remettre un peu de vérité de le mythe de cet auteur dont on se plaît à moquer les descriptions interminables qui lui permettaient – selon la légende – d’emmagasiner plus d’argent. Je le voyais personnellement perfusé au café. Là où le bougre est fort, c’est qu’il est surtout parvenu à se créer une légende personnelle en se décrivant comme tel dans ses diverses correspondances ; pour autant, il semblerait surtout qu’il ait eu un rythme de travail plutôt classique.
En fait, c’était un sacré coco : persuadé d’avoir un talent pour les affaires (mais poissard au possible), très à l’aise sur les questions d’argent à une époque où cela ne se discutait pas ou peu (il sera un des premiers à utiliser le thème comme ressort narratif), Honoré de Balzac ira d’idées fantasques pour gagner de l’argent en dettes multiples, cultivant une passion dévorante pour la décoration d’intérieur et les belles choses alors qu’il n’en a souvent guère les moyens. Quant à ses diverses histoires d’amour, elles valent le détour et ont nourri bon nombre de ses œuvres.
« Alors que tout le monde appelle Mme du Berny de son prénom d’usage, Antoinette, Honoré fait un truc un peu bizarre, il la rebaptise Laure, parce que « Laure est un nom chéri pour moi », dit-il. C’est surtout le prénom de sa mère ainsi que celui de sa sœur. Mais comme nous ne sommes pas titulaires d’un brevet de psychologie de comptoir, nous ne commenterons pas plus longuement ce choix tordu. »
Tout cela, Titiou Lecoq – passionnée par l’écrivain – choisit de nous le raconter avec décalage, n’hésitant pas à instiller des touches d’humour ou des remarques personnelles bienvenues. Vraiment, il y a de nombreux moments où j’ai ri, d’un rire franc et sonore, tant ses commentaires étaient drôles ET pertinents. Oui, car il y a de
l’humour, mais il y a en plus un vrai travail de fond. Elle connaît son sujet, n’hésite pas à se montrer critique sur des points biographiques contestés (notamment concernant certains éléments de la biographie écrite précédemment par Stefan Zweig) et à émettre quelques idées, mais jamais au hasard. Preuve en est que finalement, les biographies, ce n’est pas toujours barbant.
En conclusion … Un livre original, qui peut à mon avis plaire aux novices comme aux amateurs de Balzac, car il foisonne de détails et d’anecdotes sur cet écrivain. Une très bonne lecture !
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